Depuis plusieurs mois nous vivons un grand moment d’histoire pour les pays d’Amazighie-Afrique du Nord. Les révolutions tunisienne et égyptienne ont été des événements considérables, à la hauteur de ce qu’a été en 1989 la chute du mur de Berlin. Ce mouvement impulsé par la génération des réseaux sociaux est l'expression d'une revendication sociale, économique, identitaire et culturelle qui, au nom de la démocratie, revendique la liberté, la dignité, la justice et des États de droit. Ces révoltes pacifiques citoyennes témoignent d’une aspiration des peuples à vivre dans des sociétés démocratiques, laïques et respectueuses des droits fondamentaux permettant à chacun de vivre dignement.
Le courage, la détermination des femmes et des hommes de toutes conditions, engagés, font notre admiration, mais surtout, nous confortent dans la capacité qu’ont les femmes et les hommes à bâtir des sociétés modernes libres, laïques, démocratiques, ouvertes et tolérantes.
La première consécration de l'amazigh comme langue officielle au Maroc est saluée par l'ensemble des Amazighs dans le monde. Cette officialité est le fruit d’un combat identitaire permanent pacifique et désintéressé de toutes les générations de militants amazighs depuis l’avènement de l’ Étoile nord africaine en 1926 et surtout celui de l’Académie Berbère en 1967. Je suis sûr aussi que l'histoire retiendra le nom de Mohamed VI comme le premier grand personnage clairvoyant qui a su saisir l’opportunité de redonner la dignité à l'ensemble de son peuple à qui on a usurpé ses droits culturels, économiques et politiques depuis l’indépendance au nom d’une idéologie baathiste étrangère, sectaire et meurtrière.
Tout au cours de l’histoire, les Amazighs ont reçu différents apports qui ont nourri leur personnalité et leur culture. Ces apports ne peuvent pas constituer des identités. Les Amazighs avant d’être confrontés aux Phéniciens, aux Romains, aux Byzantins, aux Vandales, aux Arabes, aux Turcs et aux Européens, avant de parler et d’écrire en punique, latin, grecque, arabe, français, espagnole, italien, avant d’adopter les trois religions monothéistes, étaient des Amazighs, parlaient en amazigh et écrivaient en Tifinnegh tout naturellement.
C’est cette amazighitude (amazighité) qui tire ses racines du substrat amazigh qui a forgé les différentes identités nationales des pays de l’Amazighie, elle en constitue la sève et le socle. Elle est notre identité. C’est cette conception de l’identité historique enracinée dans cette partie de l’Afrique qui doit être consacrée. C’est elle qui nous rassemble et nous unit. Elle ne peut pas être une dimension parmi tant d’autres qui demeurent des apports (arabité, islamité, francité, hispanité, latinité, chrétienté, phénicité), elle est l’identité.
Nous pouvons donc considérer que les Amazighophones, les Arabophones et les Canariens de l’Amazighie-Afrique du Nord (Tamazgha en amazigh) se fondent dans la même identité historique amazighe. Ce sont tous des Amazighs.
Quant à la langue amazighe, elle constitue le patrimoine commun. Elle a été la première langue naturelle de tous les Amazighiens-Nord africains (Imazghanen en amazigh) pendant une grande période de l’histoire de cette grande région d’Afrique. Elle est aujourd’hui la langue maternelle de près de 40 millions de personnes.
Par conséquent, son officialité demeure un droit historique inaliénable. C’est une exigence, une chance et une échéance pour le présent et l’avenir des pays de l’Amazighie-Afrique du Nord.
Je reste optimiste pour que demain à l’exemple du royaume du Maroc qui vient d’inscrire dans le projet de sa nouvelle constitution l’amazigh comme langue officielle de voir l’Algérie et l’ensemble des pays d’Amazighie-Afrique du nord (Tamazgha en amazigh) le rejoindre.
C’est ainsi que les pays qui composeront cette future union pourront s’inscrire dans un développement économique, industriel environnemental et culturel harmonieux, participer à la modernité et à la course universelle de l'esprit humain. Il n’est pas interdit de rêver.
Ouramdane Khacer