Quelle différence d'attitudes et de visions entre ceux qui révolutionnent le monde et ceux qui veulent le rattacher à une date figée de l'histoire ! Quelle différence entre ceux qui regardent l'avenir avec optimisme et ceux qui veulent nous retourner à la période sombre du moyen âge !
Le réseau social de facebook, créé par Mark Zuckerberg, vient de nous surprendre récemment par une heureuse nouvelle, celle d'intégrer la langue autochtone d'Afrique du Nord, et son alphabet originel, le tifinagh, parmi les langues universelles à utiliser sur les réseaux sociaux. Au Maroc, où elle est reconnue comme langue officielle, le gouvernement marocain, dirigé par l'islamiste Abdelillah Benkiran, au lieu de la promouvoir sur le plan national, vient de proposer, à la dernière minute de son mandat, un projet de loi organique pour la mise du son caractère officiel dans le but manifeste de freiner sa diffusion et d'ériger d'innombrables obstacles juridiques à son intégration dans l'administration, dans le système éducatif et dans les medias ! Ce gouvernement préconise son intégration dans quinze ans, après cinq ans passé, c'est-à-dire la durée de mandat de quatre gouvernements, le temps « d'arabiser » ou d'assimiler la majorité des enfants amazighophones !!! Le temps d'accomplir leur mission anti-civilisationnel du génocide culturel envers la langue et l'identité amazighs, de plus de dix mille ans de présence en Afrique du Nord!
Ainsi, les panarabistes et les islamistes veulent bloquer tous les exploits qu'a connu la langue amazighe dans un laps du temps très court et qui sont extraordinaires. La diffusion par exemple de son écriture, freinée par les Romains, il y a de cela vingt siècles, a été adopté en février 2003 par l'Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM), reconnu dans le Journal officiel et intégré à l'école primaire la même année. En juillet 2004, l'alphabet tifinagh a été reconnu officiellement comme faisant partie du Plan Multilingue de Base par l'Organisation Internationale de Normalisation (ISO) installé au Canada. Pour sa part, la société des télécommunications Maroc Telecom, en collaboration avec l'IRCAM l'intègre dans les téléphones portables Sony Ericsson J110i, et en collaboration avec la société Editions Amazigh (éditrice du mensuel « Le Monde Amazigh » et du site www.amadalpresse.com), l'intègre dans les téléphones LG-T300. En 2008, Windows l'intègre parmi ses polices. Et maintenant, en ce mois de juillet 2016 il entre triomphalement la toile bleue, grâce à certains militants amazighs. Ainsi, l'écriture amazighe a le mérite d'être l'une des rares langues au monde de passer de l'âge de pierre directement à l'ère de l'informatique!
Au lieu d'accompagner ces exploits et de surfer sur ses réalisations et acquis, le gouvernement conservateur et islamiste du PJD, avec la complicité explicite de ses alliés (MP, RNI et PPS), n'a fait que dresser des obstacles à sa promotion et à sa généralisation dans l'enseignement publique, allant tout à fait à l'encontre de l'esprit de la nouvelle Constitution, et des dernières recommandations des Nations Unies où celles-ci demandaient au royaume du Maroc d'adopter le plus rapidement possible le projet de loi organique sur la langue Amazigh comme une des langues officielles de l'État et de redoubler ses efforts pour offrir l'enseignement primaire, secondaire et universitaire en Amazigh, augmenter la présence de cette langue dans la télévision... (http://apsoinfo.blogspot.com/2015/10/rapport-de-lexamen-periodique-du-maroc.html).
Mais ce qui est malheureux c'est que l'actuel ministère de l'Education Nationale avait déjà reconnue que 78% des écolières et des écoliers qui terminent leurs cycle primaire ne savent ni lire ni écrire (Assabah 11/11/2015) et que 90% qui réussissent au baccalauréat ne connaissent rien de leur histoire (Akhbar al yawm 28/1 :2012). C'est-à-dire que le ministre a au moins le mérite de reconnaître cruellement que l'école marocaine est en pleine faillite et qu'elle ne produit que de pauvres idiots !!!
Mais ce qui lamentable de nos responsables politiques dans leur stratégie par rapport à l'urgente, nécessaire et profonde réforme du système éducative national c'est qu'ils continuent à minimiser et à sous-estimer le rôle fondamental de la langue maternelle, comme le préconise incessamment l'UNESCO. Ils n'octroient aucune importance à la langue amazighe et à la darija, qui sont incontestablement les langues maternelles de tous les marocains, et qui pourraient parfaitement inverser la courbe de l'échec et d'abandon scolaires, et par conséquent de contribuer à améliorer ce secteur que l'état marocain lui consacre d'importantes ressources. Dernièrement, il absorbe un budget de plus de 45 milliards de dirhams. Un pourcentage de plus de 30% du budget de l'Etat est effectivement dédié à l'éducation et formation sans résultats positifs!
Nos politiciens, qui ont perdu tout sens de responsabilité, ne pensent pas que le tifinagh n'est pas seulement l'alphabet le plus approprié pour enseigner la langue amazighe sinon aussi le « darija » ou l'arabe dialectal (ou encore l'arabe populaire), la seule et unique langue que Benkiran maitrise bien, et que celle-ci a la particularité d'être consonantique comme l'amazighe, et que ses règles grammaticales sont presques les mêmes que celles de l'amazighe !
Par contre, les élèves qui terminent leurs études primaires aux écoles rurales communautaires Medersat.Com ont un taux de réussite de presque 100%. Les filles et les garçons qui ont la chance de fréquenter ces écoles de la fondation BMCE savent lire et écrire parfaitement trois langues et chacune avec sa propre graphie. Ainsi, ils sont 100% à savoir lire et écrire l'arabe classique avec la graphie araméenne, le français avec l'écriture latine et l'amazighe avec l'alphabet tifinagh. Et le plus surprenant de tout de ces écoles pionnières, -admirées par la fondation Bill Clinton et dont la présidente, Dr. Leila Mezian Benjelloun, vient d'être décorée par le roi-, c'est que la langue et la graphie que les élèves maitrisent le plus facilement c'est bel et bien l'amazighe.
Ce nouveau projet de loi organique qui vient d'être adopté au conseil de gouvernement ce mercredi 3 aoùt 2016, et qui s'est fait sans prendre en considération les projets des ONG amazighs, ni impliquer la société civile ni l'Institut Royal de la Culture Amazighe, vise un seul objectif : condamner l'amazighe à perdre plus de locuteurs et par conséquent, le condamner à sa lente disparition, du fait que nos politiciens continuent à s'afficher une fausse identité qui n'est pas africaine mais elle est rattachée au lointain continent asiatique, plus particulièrement au Proche Orient !
En définitive, le gouvernement sortant de Benkiran et les gouvernements à venir, s'ils ne changent pas de cap, s'ils continuent à marginaliser la langue amazighe et à dresser des politiques d'apartheid anti-amazigh et de génocide culturel, ils ne feront que continuer à reproduire et à amplifier « la crise identitaire » des citoyennes et citoyens marocains, et par conséquent à convertir l'école marocaine en un moyen qui facilite la « salafisation » et la « djihadisation » des jeunes, qui déstabilisent notre pays, les pays européens et les autres pays du monde. Dans ce sens, Sa Majesté Mohamed VI, dans son discours envoyé récemment au sommet de Nouakchout des pays qui se définissent maladroitement « arabes », et qui rêvent sur le plan idéologique de l'union d'une nation fictive, l'a bien reconnu. Que les pays musulmans d'Afrique du Nord et du Proche Orient doivent reconnaître qu'ils sont la source de « terrorisme islamiste » ?
Alors la question de fond qui reste toujours posée c'est de savoir quelle option à choisir : réformer l'école en procédant à son « amazighisation », et par conséquent à réconcilier les marocains avec leur histoire. Ou garder l'école à rester « salafiste », et par conséquent à continuer à produire plus d' idiots, ou pire, plus des terroristes d'Al Qaïda et de Daech (voir mon intervention dans cette vidéo en darija: http://www.amadalpresse.com/%D9%85%D8%AF%D8%A7%D8%AE%D9%84%D8%A9-%D8%B1%D8%B4%D9%8A%D8%AF-%D8%B1%D8%A7%D8%AE%D8%A7-%D9%81%D9%8A-%D9%86%D8%AF%D9%88%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D9%82%D9%8A%D9%85-%D9%88%D8%A7%D9%84%D8%A3%D8%B9%D8%B1/ et lire cet article en français, écrit à la suite des événements de Casablanca du 16 mai 2003 et de Madrid le 11 mars 2004 : http://www.amadalpresse.com/RAHA/Terroristes.html ).
Par Rachid Raha