Il est des manifestations qui parviennent à vous vous faire changer d'avis sur le monde universitaire et ses activités élitistes, peu alléchantes et habituellement fermées aux néophytes et au grand public. Le cycle de conférences que l'association Medistone Maroc vient d'inaugurer au mois de mai 2014 est de ce genre d'activités qui, de par l'originalité de son approche et la qualité de ses interventions, arrive à surprendre agréablement.
En effet, soutenue par l'Ambassade de France à Rabat et l'Institut Français du Maroc, l'Association Medistone Maroc a organisé le mardi 20 mai 2014 à Errachidia et le jeudi 22 mai à Taza, une série de conférences ambitionnant de lever le voile sur de larges pans de l'histoire antique du Maroc.
Un programme, on ne peut plus dissuasif à priori, car tout porte à croire que cette activité ne concerne qu'un tout petit cercle d'experts chevronnés en archéologie et en histoire antique du Maroc.
Mais au fil des interventions qui étaient suivies par une centaines de personne environ dans les deux villes, la curiosité de l'assistance n'a cessé d'être attisée progressivement au gré des interventions qui ont su donner à voir l'histoire antique du Maroc (romaines et anté-romaines) ainsi que l'état des connaissances sur le patrimoine archéologique marocain et ce de manière tout aussi accessible que captivante.
Nous en voulons pour preuve le nombre et la qualité des interventions faites par le public dont la composition n'était pas limitée au cercle fermé des avertis et autres chercheurs du domaine en question, mais qui comptait surtout des étudiants de diverses formations, des acteurs associatifs, des intellectuels, bref des personnes de tout bord.
Les interventions du public ont permis, en effet, de centrer le débat sur les richesses archéologiques inestimables qui se trouvent sur plusieurs sites marocains et sur les mesures susceptibles de sauver ces richesses de la destruction et du vandalisme qui les menace surtout au vu du manque de sensibilisation des pouvoirs publiques à ce sujet.
Plusieurs interventions du public ont, effectivement, eu pour objet des considérations transversales portant sur les problématiques liées au patrimoine culturel et historique, à sa gestion, aux mesures à envisager et aux actions concrètes à prendre afin de garantir la sauvegarde des richesses inestimables dont les différents sites archéologiques marocains regorgent.
L'implication forte et résolue de l'élite intellectuelle dans ce vaste chantier de sauvegarde et de promotion du patrimoine historique ainsi que l'association des autorités locales (les élus, les fonctionnaires de l'administration territoriale, la société civile, etc.) à ce genre de manifestation scientifique, s'avèrent être la bonne résolution pour sensibiliser tous les partenaires à ce sujet, pour pouvoir par la suite, les mobiliser dans la sauvegarde du patrimoine.
Associer les jeunes, en leur donnant les clés pour comprendre et pour s'approprier le patrimoine culturel marocain ; amener l'université, l'école, et les médias à faire de ce dossier une priorité d'ordre stratégique ; initier la création de structures associatives dont l'objet est de fédérer toutes les bonnes volontés afin de sauvegarder et promouvoir les sites archéologiques marocains, sont des mesures, parmi tant d'autres, qui ont pu émerger des débats passionnants auxquels ces rencontres ont donné lieu.
Si ces débats ont permis de mettre en exergue les défaillances des pouvoirs publics qui ne disposent pas de stratégie claire et efficiente visant à sauvegarder et à promouvoir les richesses du patrimoine culturel marocain, ce qui est encore plus intéressant à remarquer, c'est que ces débats ont montré la grande fierté des Marocains à l'égard de leur patrimoine et ce par delà les étroites considérations liées à la langue, à l'origine ethnique, aux convictions religieuses, etc.
C'est dans cette mesure que ces conférences ont réussi, à mon sens, la mission de promotion du patrimoine archéologique marocain. Un patrimoine dont les citoyens sont fiers est un patrimoine qui sera présenté comme faisant partie intégrante de l'identité marocaine, qui, de ce fait, devra être mis à contribution pour créer toute sorte de dynamique socio-économique : tourisme culturel, savoir-faire local, patrimoine culturel immatériel, c'est à dire autant de leviers au service du développement économique du Maroc profond.