L’ouvrage intitulé Tamedoult : histoire d’un carrefour de la civilisation maroco-touarègue que nous propose l’auteur, Mohamed Handaine, peut s’inscrire dans le contexte général des thèmes de recherche historique et patrimoniale du Maroc qui n’ont pas eu la part d’intérêt qu’ils méritent réellement de la part des chercheurs et des spécialistes.
La recherche scientifique sur l’Histoire ancienne et ou sur le Patrimoine ancien du Maroc en général, et sur celui du sud marocain en particulier, est très souvent une véritable aventure qui suppose autant de précautions que d’audace. Ceci est notamment valable quand le thème de recherche qu’on se propose d’aborder est l’un de ceux que nous qualifierons métaphoriquement comme étant dans un « état comateux prolongé dès la naissance». C’est dans ce genre de situations généralement dues à un fastidieux manque de données que se trouve bon nombre de thèmes de recherche en rapport avec certaines phases de l’histoire ancienne de l’Homme au Maroc. Celles-ci donnent souvent lieu à des pages obscures -pour ne pas dire blanches- sur le thème en question, un vide que l’effet du temps creuse davantage selon le nombre de générations humaines qui ont défilé.
Il est évident que le degré de risque dans ce genre de cas est énorme, puisqu’il s’agit d’une menace pour la Mémoire commune où les mêmes pages blanches en question menacent de s’envoler un beau jour à jamais. Mais d’un autre côté, nous devons, à notre sens, nuancer cette idée en disant que ce ne sont pas nécessairement les traits les plus lointains de notre histoire qui sont les seuls menacés par cette « amnésie ». La récente annonce (mai 2008) de la découverte des ruines d’une cité jusqu’ici inconnue, car engloutie sous terre aux environs de la ville de Fès n’est-elle pas une preuve flagrante de ce genre de faits ? N’est-ce pas là la trace d’un lot de ces pages blanches ou obscures de l’histoire du Maroc qu’il incombe maintenant aux chercheurs de dépoussiérer ? Quelqu’un ou quelques uns de nos chercheurs doivent bien être parmi les premiers à se prononcer à ce sujet au risque d’avancer des hypothèses à titre de plateforme à valider ou à amender ou à réfuter carrément par d’autres chercheurs qui se grefferont par la suite sur le thème.
Mais de telles découvertes scientifiques et ou archéologiques, si bien très importantes en tant qu’acquis en elles-mêmes, n’ont pas nécessairement les mêmes chances, non seulement de susciter l’appétit des chercheurs, mais aussi et surtout d’aboutir à des résultats heureux, c’est-à-dire scientifiquement fiables.
Le cas de l’histoire de la petite cité Tamedoult n-Ouqqa, au carrefour des hauteurs du Bani de l’Anti-Atlas que le chercheur Mohamed Handaine se propose de nous présenter sous le titre de Tamedoult : histoire d’un carrefour de la civilisation maroco-touarègue est un bel exemple de cette aventure nécessaire dans la recherche scientifique. L’ouvrage est à notre sens une plateforme qui ôte davantage le voile sur cette cité plutôt oubliée, et dont certaines données, qui circulent encore de nos jours de bouche à oreille et de père en fils dans les vallées du Bani, méritent bien d’être un jour le sujet d’un long métrage cinématographique, tellement le scénario s’y prête bien.
A ce propos il est légitime de se demander si la Mémoire de la ville d’Aqqa et de sa cité, Tamedoult qui ont vécu des jours glorieux côte à côte à l’époque des routes de caravanes vers Tombouctou et le reste de l’Afrique au sud, et vers Essaouira et l’Europe au Nord, pourrait renaître de ses cendres par de généreux gestes de la part des chercheurs!?
L’un des mérites et non des moindres de cet ouvrage intitulé Tamedoult : histoire d’un carrefour de la civilisation maroco-touarègue, c’est qu’il est susceptible d’éveiller au-delà même d’un simple compte populaire, et donc oral, sur le site- bien des réactions et des débats parmi les chercheurs et spécialistes, ce qui est tout à l’honneur de Mohamed Handaine qui s’est engagé dans cette aventure.
Pour toutes ces raisons, cet ouvrage nous semble être un plus pour la bibliographie historique et patrimoniale du Maroc puisque son auteur aspire contribuer à combler une lacune, celle de l’histoire de Tamedoult n-Uqqa, cette cité qui était et qui n’est plus.
Enfin, nous espérons que l’ouvrage de Mohamed Handaine suscitera l’appétit des archéologues qui peuvent redonner à leur façon un nouveau souffle de vie au site, ou du moins à sa Mémoire ; un site qui, même s’il n’a pas été physiquement englouti par la terre, il l’a été d’une part par l’amnésie de l’Homme, et d’autre part, malheureusement, par une bonne dose de négligence du côté des chercheurs et spécialistes marocains.
Dr. Ahmed Sabir
Doyen de la faculté des lettres et des sciences humaines Agadir
L'auteur: Mohamed Handaine
Docteur en histoire enseignant chercheur,coordinateur régional de la cellule de l'enseignement amazigh Souss-Massa-Daraa
Il a participé dans plusieurs conférences nationales et internationales.
Président de la Coordination Autochtone Francophone (CAF)
Il a publié plusieurs ouvrages: