Le Ministère marocain de l'Intérieur a déclaré qu'au vu de son caractère ethnocentrique, le Parti Démocratique Amazigh Marocain est illégal. Ce parti rétorque que l'obligation qui lui est faite de comparaître au tribunal ce mois s'inscrit dans le cadre de la politique d'arabisation visant à détruire l'identité amazighe.
Un parti politique amazigh marocain doit comparaître le 17 décembre
devant le tribunal, qui décidera de sa légitimité. S'appuyant sur la
loi marocaine qui interdit tout parti politique fondé sur des critères
ethniques ou linguistiques, le Ministère de l'Intérieur a publié un
communiqué le 25 novembre affirmant que le Parti Démocratique Amazigh
marocain (PDA) est illégal.
Affirmant que la culture amazighe est une composante essentielle de l'identité marocaine et est, de ce fait, la propriété de tous les Marocains, le ministère a déclaré qu'elle ne saurait être politisée d'une quelconque manière. L'autorité judiciaire du royaume a donc intenté une action devant le tribunal administratif de Rabat visant à rendre le PDA illégal.
Le secrétaire général du PDA, Ahmed Dgherni, a déclaré à Magharebia que la loi sur les partis favorisait la seule ethnie arabe.
Appelant à la défense de "la pluralité réelle, afin que l'ensemble des voix du pays puissent trouver une expression", M. Dgherni a déclaré: "Nous ne travaillons pas seulement dans le cadre de la culture amazighe, mais sur l'ensemble des composantes de l'identité marocaine."
Et d'ajouter: "Nous demandons la préservation de l'héritage de nos aïeux et des caractéristiques du patriotisme, ainsi que la suppression des conséquences de la politique d'arabisation, qui a détruit notre culture amazigh." Selon lui, il existe un mouvement politique visant à éradiquer l'identité amazighe.
Khalid Naciri, Ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, a rétorqué que le parti était en tout point en infraction avec la loi. "Les partis fondés sur des critères religieux ou ethniques sont légalement interdits, parce qu'ils constituent le point de départ de la sédition", a déclaré M. Naciri.
"Le Maroc, en tant que société civilisée et organisée qui tente de construire sa démocratie, laisse un espace à tous les partis et à toutes les expressions politiques sans exception, sauf pour ce qui touche à l'intégrité de son entité nationale. Le parlement a voté à l'unanimité une loi en ce sens. En conséquence, ce parti ne peut exister, parce qu'il contrevient à la loi."
M. Naciri a souligné que même avec trente-trois partis au Maroc, "aucun débat n'a été nécessaire sur leur droit à exister."
Toutefois, une organisation non gouvernementale marocaine considère cet appel à dissoudre le parti comme un usage excessif de la puissance publique et une violation flagrante des traités et conventions internationaux sur les Droits de l'Homme ratifiés par le Maroc. La Ligue Amazighe des Droits de l'Homme affirme que dissoudre ce parti créerait un déséquilibre dans la structure sociale du Maroc, affaiblirait les chances de pluralisme politique et culturel, et porterait atteinte au droit légitime des Marocains amazighs à voter pour les partis politiques et les organisations de leur choix.
La légitimité de l'action du gouvernement est un autre point de litige, alors que s'approche la date de l'audition. "L'action légale a été intentée au-delà de la période légale prescrite pour ce type d'affaire", affirme M. Dgherni.
Aux termes de la loi sur les partis, le délai de remise en cause de la légitimité des partis est de deux mois. Or, selon M. Dgherni, le Parti Démocratique Amazigh marocain a été fondé le 31 juillet 2005 et "a fait procéder à l'adaptation nécessaire de la nouvelle loi le 2 février 2007".
Par Naoufel Cherkaoui
Source: Magharebia.com