Comme partout en Afrique du Nord ou même dans une partie du Moyen Orient, les jeunes ont pris leur destin en main. En Egypte, un nouveau parti a été crée par des jeunes révoltés et le débat a porté sur les conditions de l’adhésion au parti. La majorité a opté pour que les adhérents ne dépassent pas l’âge de 50 ans. Au Maroc, le secrétaire général d’un parti islamiste a donné comme prétexte pour ne pas participer à la manifestation du 20 février, son ignorance du fonctionnement de Facebook, alors que tout le monde a suivi en direct la révolution des jeunes bloguistes et facebookistes Tunisiens et Egyptiens.
Les jeunes du 20 février ont surpris tous les dinosaures de la forêt politique. D’abord par leur courage , mais surtout par leur capacité à établir des revendications communes plus précises, et à marcher ensemble pacifiquement malgré leurs divergences et leurs appartenances diverses. Cela est impossible voire impensable chez les gardiens du temple avec tous les moyens financiers et logistiques dont ils disposent. Aujourd’hui, il me semble qu’après un 20 février global des jeunes marocains, les jeunes sont appelés aussi à prendre leur destin en main, et à établir un inventaire ou une autocritique au sein de leurs organisations respectives. Autrement dit qu’il y ait un autre 20 février interne. Que les jeunes des partis politiques makhzaniens, des islamistes, des militants amazighs dénoncent les pratiques malsaines et ostentatoires d’avant le 20 février. Les jeunes, de nature, sont révoltés, rebelles, enthousiastes, motivés. Tout le monde tire profit de leur énergie : les Etats, les partis, les sociétés civiles. Dans les pays du tiers monde, cependant, on les utilise comme des esclaves, des guerriers, des êtres qui ne pensent pas, qui ne réfléchissent pas, malléables à merci. Ils sont toujours désignés par des termes péjoratifs ou condescendants : Lbrahch, Tazzanin, une fois qu’ils menacent les intérêts des soi-disant sages, autrement dit les aînés, puisqu’un jeune ne peut jamais intégrer dans ces pays là ce qu’ils appellent les conseils des sages crées juste pour éloigner les jeunes. Ces aînés œuvrent ainsi pour garder leurs intérêts symboliques ou matériels sans partage et sans discussion sous prétexte d’expérience et de savoir-faire.
Avant les manifestations pacifiques du 20 février, beaucoup ont brandi les spectres des ennemis réels ou virtuels, beaucoup d’activistes ou leaders ont reçu leur part de diffamations pour salir leur image auprès de sympathisants potentiels. Le jour du 20 février, les plus âgés se divisaient en deux tendances. En effet, d’une part, il y avait ceux qui s’attendaient à ce que les manifestants soient tabassés, voire exterminés, et qu’ à la fin, chacun regagne son domicile comme si de rien n’était. D’autre part, il y avait ceux qui attendaient comme d’habitude que le pain soit cuit pour le dévorer. Avec le 20 février la carte politique au Maroc a commencé à se redéfinir mais jamais elle ne se fera sans les jeunes cette fois-ci, à condition que la révolution pacifique des jeunes ne soit pas avortée par les spéculateurs de leur énergie. Le 20 février a montré une réalité que nous avions tous du mal à voir avant : il est possible, voire plus facile, pour les jeunes manifestants qui s’assument de se coordonner entre eux en dépit de leurs différentes tendances que de le faire avec des calculateurs opportunistes de la même tendance qu’eux.
Le discours royal a été une surprise pour tout le monde, même s’il est ouvert à plusieurs interprétations. Seul le projet constitutionnel déterminera le sens de chaque acte, et nous dira s’il y a une réponse aux revendications claires des jeunes du 20 février comme l’officialisation de la langue amazighe au même titre que la langue arabe. Une chose est sûre : après le discours royal, le train a été remis de nouveau sur les rails pour les opportunistes qui vont s’empresser de rattraper le marathon des jeunes activistes du 20 février. Nos vieux ont-ils les jambes et l’énergie pour courir ? Suffira-t-il de rouvrir les locaux des partis ouverts d’habitude pour les seules élections ? des locaux d’associations mortes ? Suffira-t-il d’animer des débats sur la constitution par des associations comme tamunt n iffus connue par tout le monde comme étant une société rentable qui organise les fêtes du nouvel an amazigh alors que le marathon du 20 février Inezgane-Agadir de 10 km a été boycotté par le PDG de cette société et beaucoup d’actionnaires âgés ? Suffira-t-il de signer des communiqués, de réanimer des débats sur des projets de partis politiques amazighs par des personnes qui se servent des jeunes comme des boucliers humains ?
Le 20 février amazigh, à mon sens ne devrait pas sortir de l’esprit du 20 février global, et les jeunes devraient continuer à marcher à côté de leurs camarades des autres tendances, mais aussi en parallèle prendre les choses en main, dénoncer tous ceux qui essayent de voler leur révolution, dénoncer les spéculateurs de la cause amazighe, dénoncer les pratiques de La S.A IRCAM qui a empoisonné beaucoup d’associations par son argent sale. Elle a, en effet, corrompu la majorité des présidents d’associations, elle a même financé des associations qui ont comme activité l’arabisation des femmes amazighes dans les montagnes, elle a acheté ces individus qui dépendent aujourd’hui des fonds de la S.A IRCAM pour réaliser quoi que ce soit pour leurs associations ou pour leur vie personnelle. L’institut culturel amazigh est une des revendications du mouvement amazigh pour promouvoir notre langue et notre culture, mais il s’est avéré que sa gestion a fait plus de mal que de bien à celles-ci. Après avoir relevé les salaires de ses dirigeants, cette institution étatique créée par un dahir n’est pas là pour promouvoir notre langue et notre culture amazighes mais pour promouvoir la politique culturelle actuelle de l’état marocain. Le rectorat de l’IRCAM est une partie intégrante du gouvernement puisque des partenariats ont été signés entre le gouvernement et l’IRCAM; qui marginalisent les Amazighs et leurs culture, comme la création du conseil consultatif des immigrés marocains, qui a exclu les Amazighs et leur langue, aucun acteur associatif amazigh n’est représenté, des fonds pour promouvoir l’arabe et arabiser les amazighs ont été débloqués, mais aucun centime pour l’enseignement de la première langue des Marocains dans des pays d’immigrations. Le pire est l’implication de cette institution dans l’amputation de l’histoire du Maroc puisqu’ils l’ont réduite à douze siècles. L’actuel gouvernement a fait de cette institution une coquille vide pour faire passer sa vision de la culture marocaine. Cela a poussé quelques membres courageux de son conseil qui n’ont pas accepté de vendre leur âme ni de mettre le tarbouche rouge sur leur tête ni de sacrifier leurs convictions en contrepartie d’un salaire mensuel, à démissionner de l’IRCAM qui a été détournée de son but initial revendiqué auparavant.
Les jeunes Amazighs du 20 février doivent prendre position sur la gestion de leur cause, l’avenir leur appartient. Les acteurs associatifs devraient-ils continuer à se positionner comme bouclier humain pour ces gens qui parlent toujours à leur place, et qui se présentent toujours comme leur porte-parole ?
Les acteurs du MCA qui ont marché dans les manifestations , qui ont reçu leur part de matraques dans les sit-in devraient sortir de leurs universités de temps en temps, oublier le rêve de tamazgha et du panamazighisme et affronter la réalité de la rue, les enjeux malsains, les spéculateurs de la cause. Ce rêve de Tamazgha, a imddukkal, ne va que marginaliser encore plus les vrais militants. Comme nous réclamons un premier ministre responsable qu’on peut juger après son mandat en cas de litige, nous devrons nous adresser aux acteurs d’un état-nation précis, un gouvernement précis, et si nous le faisons pas, les spéculateurs vont le faire à notre place pour augmenter encore plus leurs revenus mensuels. Ceci dit, nous sommes tous appelés à renouveler nos rituels, nos slogans, nos champs d’investigations, à accepter nos diversités pour mieux nous unir, mais surtout laisser nos portables allumés pour dénoncer Ixndallasn et Ibznazn qui se faufilent entre nos rangs. Les spéculateurs de la cause manquent de courage, les jeunes manquent de confiance, mais il faut plonger dans l’eau pour apprendre à nager. Autrement s alamazighyya tamazight comme a dit Azayku : ur a ssar naf imndi gh wakal n wiyyad. Les jeunes devraient créer d’autres structures, devraient gérer leurs biens, le temps des Ixmmasn doit être révolu. Nous devrons dénoncer la corruption, le népotisme partout y compris chez ceux qu’on croit des nôtres.
Tamazight devra être langue officielle dans sa terre. Nous marcherons le 20 mars, pour revendiquer son officialisation, mais jamais sans notre drapeau amazigh multicolore .